Premiers commentaires sur les élections européennes

, par Valéry-Xavier Lentz

L’élection européenne donne toujours matière à des résultats inattendu. Le vote à la proportionnelle donne en effet une occasion à l’électorat de s’exprimer dans un contexte nouveau et de tenter soit d’exprimer une opinion muselée par la nécessité du vote utile en scrutin majoritaire, soit de tenter d’envoyer un message ou de rééquilibrer les forces au sein d’un camp.

Voici quelques observations en vrac.

Au niveau fédéral

  • l’Europe est plus que jamais de droite. L’écart entre le PPE et les autres groupes parlementaire s’accroît malgrès la défection des trente conservateurs britanniques qui devraient créer leur propre groupe avec des renforts très suspects de la droite radicale polonaise, ultre-actho et homophobe, notamment. 
  • la reconduction de Barroso est donc quasi assurée. L’Union européenne est une démocratie : quand ses citoyens votent à droite, le président de la Commission est de droite. Cette reconduction est regrettable pour l’Union européenne compte tenu de la médiocrité dans laquelle Barroso a maintenu la Commission pendant son mandat. Le seul espoir à présent est que certains membres du Conseil en prennent conscience et imposent la recherche d’un autre président, au sein du PPE naturellement. L’initiative pourrait venir de Sarkozy selon la rumeur.
  • le rapport de force dans le clivage europeiste/nationaliste reste très largement en faveur du camp européen en dépit du progrès des partis les plus nationalistes, notamment au Royaume-Uni avec 15 sièges (3 BNP, 13 UKIP). Notons toutefois l’échec réjouissant de Libertas qui n’aura peut être que deux élus (1 en Irlande, 1 autre en France grâce à la Vendée). 
  • Les partis les plus fédéralistes (écologistes et libéraux se maintiennent ou progressent, ce qui est la nouvelle réjouissante de cette élection. Dommage que ceci se fasse seulement aux épens du reste du camp progressiste.L’effet Cohn-BenditL
  • L’absention est importante parout dans l’Union, pour les mêmes raison qu’en France. J’y reviendrai.

Au niveau français

  • le rapport des forces droite/gauche penche plutôt en faveur de cette dernière, ce qui est occulté par le fait que la droite governementale ne présente qu’une seule liste. En comparaison du parti du président de la République, les voix sont bien plus nombreuses à se porter sur les listes de l’ancienne "gauche plurielle".
  • l’effet Cohn-Bendit joue à plein. Le charisme du leader des Verts au Parlement européen, associé à l’absence de rénovation du PS, aux bourdes monumentales de Bayrou en fin de campagne et à la présence forte de l’environnement dans l’actualité, a contribué à faire exploser le vote écolo.
  • L’environnement était au coeur de l’actualité dans les jours précédent l’élection et cela a pu jouer, e la même manière que le père Voise en 2002, ou que les difficultés de certaines entreprises montées en épingle par les médias en 2005. Le résultat d’une élection est lié à l’actualité. Seuls ceux qui savent y lire les facteurs dominants et en profiter triomphent.
  • Le rapport de force entre europhiles et nationalistes est très largement ici aussi en faveur des europhiles (européistes ou fédéralistes). Le recul du FN, l’échec piteux de Libertas et de la seule lîste se réclamant du gaullisme ne peut que réjouire. L’extrême-gauche ne fait guère mieux : si le PCF, avec le renfort de l’ignoble Mélenchon, réussit à se maintenir, voire à progresser en comparaison de la déconfiture de l’élection présidentielle, les trotskystes échouent à obtenir des sièges.
  • La bonne nouvelle est l’élection ou la réelection de nombreuses personnalités qui devraient être des eurodéputés de qualité, à commencer par Sylvie Goulard, Cohn-Bendit, Pervenche Bérès (en dépit de ses errements) ou encore Alain Lamassoure. 
  • Si l’on peut regretter l’échec du PS, il faut espérer que ce résultat sera l’électrochoc qui permettre, non plus de le rénover, mais comme l’on souligne certains commentateurs socialistes, de le reconstruire et de l’élargir. L’échec du noniste Benoît amon, qui plombe la direction actuelle avec son courant tendance gauche archaïque, et très mauvais eurodéputé, est une des bonnes nouvelles de la soirée. On se prend à réver de la construction d’un grand parti de la gauche réformiste qui aille au delà du PS, avec les écologistes et certains centristes, le danger Bayrou semblant désormais écarté pour la gauche, grâce aux écolos. Fonder un nouveau parti, abandoner les références aux connotations marxistes ou ringardes comme le mot "socialiste", casser un appareil verrouillé. Aubry doit oser ou disparaître.