Le projet de déclaration de principe du PS eurotiède

, par Valéry-Xavier Lentz

La nouvelle déclaration de principe du PS, diffusé lundi 20 avril, affirme timidement l’adhésion du Parti à l’économie de marché et à l’Europe.
Le Parti Socialiste a fait connaître lundi son projet pour une nouvelle déclaration de principe, un document s’efforçant de définir l’identité du Parti (voir ici celui adopté au Congrès de Rennes en 1990). Il sera soumis au vote des militants.

Disons le d’entrée, cette déclaration constitute un progrès significatif pour le PS. La preuve en est que le sénateur d’extrême-gauche Jean-Luc Mélenchon, toujours encarté au PS, a émis des réserves à son propos, selon Libération. Lesquelles ? on ne sais pas encore car sur son blog il consacre son énergie à pondre de longs textes sans paragraphes pour défendre la dictature de Pékin.

Un Bad Godesberg français ?

Les commentateurs retiennent de ce texte essentiellement l’affirmation du réformisme et l’adhésion explicite du PS à l’économie de marché.

Les références au marxisme et à sa mythologie révolutionnaire sont abandonnées en effet. Le texte indique :

Les socialistes portent une critique historique du capitalisme, créateur d’inégalités,
porteur d’irrationalité, facteur de crises, qui demeure d’actualité à l’âge d’une mondialisation
dominée par le capitalisme financier.

Les socialistes sont partisans d’une économie sociale et écologique de marché},} une
économie de marché régulée par la puissance publique, ainsi que par les partenaires sociaux.
Le système voulu par les socialistes est une économie mixte, combinant un secteur privé
dynamique, un secteur public, des services publics de qualité, un tiers secteur d’économie
sociale.

Les socialistes affirment que certains domaines de l’activité ne peuvent relever du
fonctionnement du marché, quand ils concernent des droits essentiels. Les socialistes font de
la création durable et de la redistribution des richesses un enjeu majeur de l’action politique.
Ils pensent que les politiques participant aux enjeux environnementaux doivent être
coordonnées par la puissance publique garante du long terme et de l’intérêt général.

On reste loin malheureusement du programme de Bad Godesberg adopté par le SPD en 1959 (quelqu’un peut-il me donner un lien vers une version française de cette déclaration ?). Les aspects bénéfiques de la concurrence et de la libre-entreprise ne sont pas évoqués, pas plus que la condamnation du communisme et des autres idéologies à tendance totalitaires issues de la culture marxiste. Le réformisme du PS français reste culturellement mal assumé.

Notons l’apparition de la thématique écologiste. Ce point est essentiel mais surprend, compte tenu de la faible prise en compte jusqu’à présent de ces problématiques par le PS dans sa pratique comme dans son discours. La faible considération de l’alliance avec les Verts, alors que le PS se rend coupable d’acharnement thérapeutique à faire survivre électoralement le PCF, tout comme la très modeste prise en compte des impératifs écologistes lors de l’exercice du pouvoir, y compris à Paris, peut faire penser à un positionnement avant tout marketing.

On s’étonnera de plus de la formulation maladroite retenue qui au lieu de se parler d’environnement (c’est à dire une problèmatique liée à l’homme) la met sur le même plan « l’émancipation complète de la personne humaine et la sauvegarde de la planète ».

Un europeisme sans ambition

Le projet de texte progresse aussi sur la prise en compte de l’enjeu européen, auquel est consacré un article entier. La version précédente de la déclaration mêlait ce thème aux questions internationales.

Ancienne version :

« Le Parti socialiste fait le choix de l’Europe pour donner aux nations qui la composent les moyens d’affronter les défis de l’avenir. La Communauté Européenne, à condition qu’elle ne se réduise pas à un simple marché, en sera un élément moteur. Les socialistes s’attachent à accélérer la construction européenne dans toutes ses dimensions politiques, économiques et sociales. »

... le tout suivi de considérations tiers-mondistes et pacifistes.

Nouvelle version :

Le Parti socialiste est un parti européen qui agit dans l’Union européenne qu’il a non
seulement voulue, mais en partie, conçue et fondée. Il revendique le choix historique de
l’Union européenne et de la construction d’une Europe politique. Pour les socialistes, celle-ci
doit avoir pour mission, par ses politiques communes, d’assurer la paix sur le continent et d’y
contribuer dans le monde, de favoriser une croissance forte et durable et le progrès social, de
promouvoir la créativité et la diversité culturelle, d’aider à relever les défis planétaires par
l’exemple d’association qu’elle offre. Membre du Parti socialiste européen, le Parti socialiste
entend tout mettre en oeuvre pour le renforcer afin que soit porté un message socialiste en
Europe.

Le progrès là aussi est notable. Toutefois en revendiquant ce choix européen sans souligner le chemin qui reste à accomplir vers une Europe politique et démocratique, c’est à dire fédérale, le PS s’en tiens ici à une déclaration purement européiste, c’est à dire sans grande valeur ajoutée.

Par ailleurs l’appartenance au PSE et ce qu’elle implique mériterait d’être développée.

La rénovation dans la bonne voie

Le texte comporte d’autres manques. Il affirme l’atatchement à la démocratie, comme objectif et comme moyen, mais ne précise pas laquelle (la Ve République est-elle satisfaisante ? la démocratie concerne-t-elle seulement le cadre national ?). Il mentionne la « décentralisation » mais ne mentionne son inachèvement, dans une pudeur toute jacobine.

Toutefois, malgrès ces insuffisances criantes, le projet de déclaration constitue le signe que la rénovation du PS progresse.

À petits pas...