Aujourd’hui c’est au tour du choix de Jack Lang d’être contesté et accompagné d’appels à l’exclusion.
Quels sont les enjeux de ce débat ?
- Il est essentiel que le positionnement d’un parti politique soit lisible car c’est en fonction du parti que l’électeur fait son choix, et très peu, en dépit de la fiction justifiant un mode de scrutin uninominal, en fonction de la personnalité du candidat.
- Il est important qu’un groupe parlementaire puisse, pour peser, adopter une stratégie cohérente dans son action, ce qui implique une certaine discipline (et les socialistes français devraient s’en souvenir lorsqu’ils siègent au sein du groupe socialiste au Parlement européen).
Compte tenu de l’importance de l’enjeu, il eut été préférable en effet que Jack Lang, même s’il était sincèrement favorable à la réforme, choisisse au moins l’abstention.
Faut-il le sanctionner ? Sans doute. Les formes de sanction sont multiples au sein d’un parti politique. Il est possible de lui retirer des responsabilités au sein du parti ou du groupe parlementaire, de le suspendre ou de l’exclure de certaines instances. Il est possible aussi, s’il n’accomplis pas sa mission de député conformément aux orientations du parti, de ne pas lui donner l’investiture lors d’une prochaine élection, en choisissant un autre candidat pour porter les couleurs socialistes.
Mais l’exclusion est un acte plus grave. Si Jack Lang se reconnaît dans le Parti socialiste, l’exclure parce que sur un point particulier — les institutions — il ne partage pas la ligne majoritaire, serait parfaitement excessif.
Faire campagne contre son parti, s’opposer — en toutes circonstances et en tout point — à la ligne politique déterminée par ses adhérents, bafouer un référendum interne, se porter candidat sur une liste concurrente ou soutenir publiquement un candidat adverse, ou encore rejoindre un gouvernement de droite... voilà autant de motifs plus légitimes d’exclusion.
Il faut aussi conserver une certaine cohérence. Souvenons nous que lors de la dernière modification de la constitution française, en février, plusieurs élus avaient rompus avec l’orientation du parti sans être pour autant sanctionnés le moins du monde. En réalité un Mélenchon (au hasard) a potentiellement sur le fond bien plus de motifs de se faire exclure qu’un Jack Lang [1], tant que ce dernier ne franchit pas de ligne jaune.
Plus sérieusement, l’épisode de Versailles pose aussi d’autres questions, auxquelles je ne répondrai pas, car il se fait tard.
- Pourquoi se focaliser sur la seule personnalité de Jack Lang alors que ce sont avant tout les élus du PRG qui ont fait pencher la balance ? Ce parti, dont la survie électorale est fonction du soutien des socialistes, a eu dans cette affaire une démarche troublante.
- la réforme méritait-elle d’être combattue comme elle l’a été ? L’opposition frontale n’est-elle pas le meilleur moyen de servir Sarkozy ? En effet une opposition faisant bloc systématiquement contre les projets gouvernementaux rencontre nécessairement une majorité rassemblée. Par conséquent le Parlement devient un simple jeu de rôle où la majorité approuve et l’opposition rejette, ce qui diminue très significativement l’intérêt du débat parlementaire. Des conditions plus raisonnables n’auraient-elles pas permises une meilleure prise en compte de la contribution des socialistes dans ce débat ? ... en admettant que minoritaires ils ne pouvaient réorienter complètement le projet dans leur sens.
- la réforme elle-même est-elle effectivement une accentuation du pouvoir présidentiel ? De nombreux experts relativisent son importance. Il est vrai que les points les plus significatifs sont une série de détails techniques mais qu’elle ne bouleverse pas nos institutions. L’impact de cette réforme sera, à titre de comparaison, bien moindre que le pourtant trop modeste traité de Lisbonne n’en aura sur les institutions européennes.
- la réaction très équilibrée de Pierre Moscovici
- Occasion manquée pour le Parti Socialiste : tribune des députés Christophe Caresche, Jean-Marie Le Guen, Gaëtan Gorce et Manuel Valls.
- Jack Lang doit rester au PS ! de Luc Mandret qui serait plus convaincant encore s’il y était lui-même resté.
- Guy Carcassonne : « On ne constitutionnalise pas le sarkozysme » dans Le Monde (via authueil).
- et enfin la réaction toujours indispensable de Maitre Eolas.