Ce billet constitue le second d’une hypothétique série sur le multilinguisme dans les sites internets. Il fait suite au précédent intitulé "Représenter les langues d’un site web" qui abordait la navigation entre différentes versions linguistiques.
La page d’accueil demeure la page la plus visité de la plupart des sites internets, même si sur la plupart des sites une très large majorité des visiteurs entrent via une page de contenu référencée sur un moteur de recherche.
Dès lors que le site est multilingue, deux questions se posent :
- Dans quelle langue doivent être rédigés son interface et son contenu ?
- Comment faire comprendre au visiteur qu’il a la possibilité de changer de langue ?
Autant le dire tout de suite, il n’existe pas de bonne solution, ou en tout cas
La pré-page d’accueil
La solution de facilité mais aussi la plus simple, notamment dans le cas d’un site massivement multilingue, et de proposer une page proposant la liste des langues disponibles dès la connexion de l’internaute. Ce dernier est dès lors contraint de sélectionner une langue avant de visualiser le contenu du site.
Notons que c’est sans doute là un des rares cas d’utilisation d’une pré-page d’accueil qui puisse être considéré comme tolérable. En règle générale tout obstacle entre le visiteur et l’information qu’il recherche est à bannir : ça agace.
La page d’accueil du Parlement européen : 21 liens et une faute de goût : une phrase en anglais inutile
Le site du premier ministre de Belgique (détail) : c’est déjà plus simple, mais qu’est devenu l’allemand, si je ne m’abuse également langue officielle au niveau fédéral.
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Une langue par défaut
Une autre solution consiste à proposer une page d’accueil en anglais dans une langue par défaut dont on estime qu’elle est comprise par la majorité des visiteurs. On s’efforce alors de mettre en évidence la possibilité de changer de langue si nécessaire.
Ainsi une multinationale pourra proposer sa page d’accueil en anglais et un menu pour passer vers des traductions du site. J’élude délibérément le cas de figure de la famille de sites de filiales avec des noms de domaines différents. Le multilinguisme ainsi évacué finit par revenir par la porte de derrière (et il n’est pas content) dès lors que l’on veut utiliser un .be ou un .ch par exemple.
Un site espagnol pourra afficher son contenu en castillan avec des liens vers les versions catalane, basque ou gallicienne.
Un site belge va chercher une autre solution ou courir au devant de gros ennuis.
Le site portail de l’administration suisse propose une page d’accueil... en anglais !
Une langue par défaut avec détection automatique
La solution la plus sophistiquée consiste à chercher à deviner identifier la langue préférée de l’utilisateur. Il existe toute une série d’indices parmi les informations que votre navigateur internet envoie au serveur du site lorsqu’il se connecte, à commencer par l’emplacement géographique de votre ordinateur, déduit de manière plus ou moins fiable de son adresse IP (une série de numéros plus ou moins unique vous identifiant sur le réseau) et surtout par la ou les langues par défaut du navigateur.
Si votre navigateur dispose d’une interface en français, la langue par défaut d’un tel site sera le français, s’il est disponible. Le webmaster belge est sauvé, il ne devra pas subir l’ire flamande, il pourra proposer une page d’accueil en néerlandais à ses internautes Anversois.
La page d’accueil tour de babel
Oui, mais non... Extrêmement rare : les articles des différentes langues sont mêlées sur la page d’accueil.
La solution peut être appropriée lorsque l’on s’adresse à un public dont on sait qu’il maitrise effectivement les langues concernées. L’avantage principal est que si l’intégalité du site n’est pas traduit, cela permet de continuer à proposer l’ensemble des contenus disponibles.
Les inconvénients de la solution sont évidents : il devient beaucoup plus difficile de parcourir rapidement les titres de la page, d’autant plus que l’on ne comprend pas toutes les langues.
Il n’est pas certain que Google apprécie non plus. Il faut en toute hypothèse pouvoir bien identifier dans le code chaque bloc de contenu à l’aide du code de langue correspondant.
Enfin, pour le politiquement correct : l’interface de navigation ne peut être que dans une seule langue sauf à n’utiliser que des images. Il y a donc toujours un privilégié.
Le site spip-contrib propose des extensions pour SPIP. La page d’accueil mélange ici articles français et espagnols.
I will be back
Le Graal d’un site internet est le visiteur récurrent. Il n’est pas nécessaire le tester sa patience en lui imposant de sélectionner sa langue à chaque visite.
Bien sur, on peut espérer qu’il inscrive dans ses favoris l’adresse de la page d’accueil dans sa langue. Nous avons là le visiteur parfait. Il est sinon possible de conserver une trace du choix réalisé lors de la première visite, soit par l’utilisation d’un cookie, soit dans le meilleur des cas, si votre site le proposer et que le visiteur crée un compte utilisateur, par la conservation de ce choix dans son profil.
Conseils pour votre cahier des charges
La gestion du multilinguisme est un facteur de complexité supplémentaire dans un projet web. Il est essentiel qu’elle soit prévue dès la conception du site sous peine d’entrainer coûts et délais supplémentaires par la suite.
Le multilinguisme conditionne par exemple le choix de l’outil de gestion de contenu, des modes de navigation et de l’organisation de la page d’accueil. Il implique potentiellement la mise en place de codes particuliers dans les gabarits du site.
Il faut donc préciser dès le cahier des charges un maximum de détails :
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- si le site doit être disponibles en plusieurs langues ou s’il faut le prévoir dès à présent pour une version future
- le nombre de langues est-il définitif ou faut-il prévoir l’ajout de langues supplémentaires ?
- l’intégralité du site est-il traduit ou bien seulement quelques pages ?
- l’arborescence du site sera-t-elle identique ou non selon les langues ?
- les langues doivent-elles être traitées sur un pied d’égalité ou bien existe-t-il une langue principale sur le site ?
- faut-il prévoir une optimisation pour le référencement dans toutes les langues ? et une démarche de référencement correspondante ?